La naissance de Nicolas Bouchard

Nicolas Bouchard naquit le neuf septembre 1673¹ADSM Rouen, paroisse St Martin sur Renelle, 3E registre 458, vue 34/46 et 4E2128, vue 80/205, fut baptisé en la paroisse St Martin sur Renelle le « onzième jour  Nicolas fils de Messire Alexandre Bouchard  chevalier seigneur et patron de Méheudin ….baron de Guibray conseiller du roy en son parlement de Normandie et de madame Elisabeth Suzanne Marie Vauquelin…et nommé par Nicolas  Bouchard chevalier seigneur et vicomte de Blosseville…… et Louise Bouchard femme d’ escuyer du Houlley des Essarts….lieutenant général en la table de Marbre au Parlement de Normandie ». Les titres portés par Alexandre Bouchard, sont ceux récemment acquis par son mariage en 1671 avec Elisabeth fille de feu Claude Vauquelin. Le parrain Nicolas Bouchard, au vu de la signature, était le grand-père (1608-1677, époux de Marguerite du Jardin). Louise Bouchard (1638-1681), la marraine était la tante de l’enfant et avait épousé Adrien du Houlley en 1663.

Nicolas Bouchard fut reçu conseiller lai au Parlement de Normandie²Frondeville De, Henri et Odette. Les conseillers du parlement de Normandie de 1641 à 1715. Tome IV. Rouen Lestringant. le 22 décembre 1692 à une charge de nouvelle création qui coutât 45.000 livres.

Le 8 mars 1698, il signa l’acte d’inhumation³ADSM, Rouen, décès p. St Laurent  4E 2068, vue 159/189 ; p. St Lô, 3 E999, registre 303, vue 120/177 ; 4E 2073, vue 104/138  de sa soeur Marie à St Lô «le corps de feu damoiselle Marie Bouchard de Blosseville âgée de 19 ans décédée du 7ème jour après avoir reçu le sacrement d’extrême onction a été inhumée en cette église en présence de messire Nicolas Bouchard conseiller du roi en son parlement de normandie son frère et de Gaspar Lenepveu de saint Georges». Ce témoin⁴ADSM Rouen, époux d’une Marie Bouchard le 15 mai 1697 à St Nicaise (registre 490, 313/381), décédée à 71 ans le 9 mai 1729 à Bouquetot (AD Eure, BMS 1722-1745, vue 106/371). Son père était un Nicolas Bouchard d’Englesqueville et sa mère Elisabeth Liard (e). était apparenté par alliance à la famille Bouchard.

La mort de Nicolas Bouchard

En poursuivant la rédaction du mémorial familial⁵Le Corbeiller E. Les livres de raison en Normandie. Une famille de robe au XVII et XVIIIè siècles. pp 197-215.  Revue Catholique de Normandie. 3 ème livraison. 15 novembre 1899. voir p. 212. initié par son père, Pierre Baudouin du Basset (1644-1730) a légué à la postérité des informations de grande valeur. Sa soeur Isabeau du Basset (1639-1701) ayant épousé l’oncle paternel du Nicolas qui nous occupe, nous disposons d’une chronique des évènements familiaux subis par les Bouchard. Ainsi, après avoir écrit comment sa soeur devint veuve en 1678 puis perdit son fils « le cinquième jour de janvier 1699 », Pierre Baudouin ajoutait « peu de jours après, le fils unique de feu Mr de Blosseville fut tué d’un coup d’épée et aussi enterré à St Lô, et ainsi les deux seuls garçons de la famille Bouchard moururent et il ne reste plus que des filles dans la famille ». La mort violente de Nicolas Bouchard (1673-1699) est donc certaine ainsi que le lieu de son décès. Pierre Baudouin du Basset fut d’ailleurs un des deux témoins de l’inhumation.

Nicolas Bouchard décéda le 12 février 1699 à Rouen, paroisse St Laurent⁶ADSM Rouen, paroisse St Laurent, registre 278 (1690-1699) vue 201/217., « chevalier seigneur de Blosseville conseiller au parlement et âgé d’environ 27 ans lequel fut porté et inhumé dans le choeur de l’église paroissiale St Lô⁷ADSM Rouen, paroisse St Lô, registre 303 (1691-1700), vue 141/177, 4E2073 vue 122-123/138. lieu de la sépulture de ses ancêtres le 13 ème jour du même mois, en présence de messires Pierre Baudouin seigneur du Basset et Nicolas le Pesant, seigneur du Boisguilbert, tous deux conseillers au Parlement». 

 L.Prévost⁸Prévost L. Recherches historiques sur la ville et la vallée de Veules. 1888. Réimpression. Bertout Luneray, 1980. p 79/114. évoque cette mort au cours d’une « scène sauvage » à Veules avec force détails mais sans citer ses sources « au retour d’un bateau parti à la pêche aux harengs en septembre 1698, opposant les officiers de l’abbaye de Fécamp et les gens du vicomte de Blosseville, lequel « périt dans la bagarre et son cadavre promené dans les rues fut insulté… puis abandonné au fond d’une cavée…ses serviteurs le recueillir et purent l’inhumer dans le cimetière de sa paroisse, les assassins ne furent pas inquiétés tant était grande la désorganisation des services publics ».  

R. Mensire⁹Mensire R. Seigneurs et châteaux du noble pays de caux in Saint-Valéry en Caux et ses alentours. Ed Le Vieux Saint-Valery, 1980. Imp Bertout, Luneray. pp 189-239 ; p205/206. relate comment « Nicolas Bouchard II^ème du nom mourut assassiné à Veules en 1698…il se rendit sur les lieux et voulut s’interposer entre les parties mais il fut entouré par des gens de l’abbaye (de Fécamp) qui le maltraitèrent bien cruellement. Il mourut quelques jours après des suites de ses blessures. Marguerite, Catherine et Madeleine Bouchard, soeurs de la victime firent de vaines démarches pour obtenir la punition des meurtriers de leur frère mais l’abbé de Fécamp couvrit ses hommes de sa protection et ceux-ci ne furent pas poursuivis ». 

Son meurtrier : Guillaume Legendre (1672-1699)

Les deux récits ci-dessus interrogent car ils taisent l’identité du meurtrier qui semble pourtant avoir été connue dès l’époque. Il s’agissait de Guillaume Legendre, dit monsieur de Romilly (Romilly la Puthenaye, près de Beaumont le Roger) né le 22 mai 1672, fils ainé de Thomas Legendre et de damoiselle Esther Scott. Il fut baptisé le 29 mai 1672, par son oncle le pasteur Philippe Legendre¹⁰Philippe Legendre, pasteur de l’église réformée de Quevilly, auteur de « l’histoire de la persécution faite à l’église de Rouen sur la fin du dernier siècle (XVII) »,1874. Rouen. Deshays Editeur. Le préambule par E. Lesens rapporte la biographie des Legendre., nommé par Thomas Legendre son aïeul paternel, et dame Catherine Porterie son aïeule maternelle. A l’époque du meurtre, son père Thomas Legendre (1638 -1706) « grand négociant de Rouen ayant des correspondants en tous pays » après avoir abjuré sa foi protestante, avait été anobli le 9 juin 1685, reconnu « comme l’un de ceux de notre royaume qui fait le plus grand commerce de mer » et était en passe d’être nommé, en juin 1700, inspecteur général du commerce et manufactures¹¹ADSM, C. 1327, registre et ADSM, 179 J 753 : Vanier G.  Une famille de grands marchands rouennais au XVI et XVII ème siècle. Les Le Gendre. Société libre d’émulation du commerce et de l’industrie de la seine inférieure. Imprimerie Dieppoise. 1950.140p..

Le parcours de Guillaume Legendre se résume à quelques lignes dans les notices biographiques. Il fut reçu, le 27 juin 1695, conseiller lai au Parlement¹²ADSM, C. 1330 registre et Frondeville De, Henri et Odette. Les conseillers du parlement de Normandie de 1641 à 1715. Tome IV. Rouen Lestringant. 1970. … « ayant tué un de ses collègues au Parlement, Nicolas Bouchard, vicomte de Blosseville, il avait été obligé de voyager à l’étranger...». Il est réputé avoir accompagné le marquis de Guiscard à Vienne, lequel y périt en décembre 1699. En revanche, contrairement à certains écrits¹³Notice sur Thomas Legendre par M. Garreta pp 47-55 in Bulletin de la Commission des antiquités de la Seine- Maritime. Tome XI. 1ère livraison. Rouen 1913. voir page 50-51., Guillaume Legendre n’est pas mort à Vienne mais à Rouen ¹⁴ADSM, Rouen, p. St Jean 4E 2062, vue 15/190  et 3 E999, registre 252, vue 13/179.:cet acte atteste qu’il y décéda le 24 octobre 1700 et fut inhumé le lendemain dans la paroisse St Jean en présence de Thomas Legendre , son père et de Pierre Legendre (1642-1716), secrétaire du roi, son oncle, lequel s’était converti au catholicisme lors de la révocation de l’édit de Nantes.

Retenons donc pour acquis que Nicolas Bouchard, vicomte de Blosseville est bien décédé le 12 février 1699 à Rouen victime d’un coup d’épée donné par Guillaume Legendre. Nous devrons explorer les archives judiciaires pour comprendre les motivations d’un tel meurtre car la discordance paraît trop grande avec les récits traditionnels impliquant les officiers de l’abbaye de Fécamp dans le port de Veules…

Références

• 1
  ADSM Rouen, paroisse St Martin sur Renelle, 3E registre 458, vue 34/46 et 4E2128, vue 80/205
• 2
  Frondeville De, Henri et Odette. Les conseillers du parlement de Normandie de 1641 à 1715. Tome IV. Rouen Lestringant.
• 3
  ADSM, Rouen, décès p. St Laurent  4E 2068, vue 159/189 ; p. St Lô, 3 E999, registre 303, vue 120/177 ; 4E 2073, vue 104/138
• 4
  ADSM Rouen, époux d’une Marie Bouchard le 15 mai 1697 à St Nicaise (registre 490, 313/381), décédée à 71 ans le 9 mai 1729 à Bouquetot (AD Eure, BMS 1722-1745, vue 106/371). Son père était un Nicolas Bouchard d’Englesqueville et sa mère Elisabeth Liard (e).
• 5
  Le Corbeiller E. Les livres de raison en Normandie. Une famille de robe au XVII et XVIIIè siècles. pp 197-215.  Revue Catholique de Normandie. 3 ème livraison. 15 novembre 1899. voir p. 212.
• 6
  ADSM Rouen, paroisse St Laurent, registre 278 (1690-1699) vue 201/217.
• 7
  ADSM Rouen, paroisse St Lô, registre 303 (1691-1700), vue 141/177, 4E2073 vue 122-123/138.
• 8
  Prévost L. Recherches historiques sur la ville et la vallée de Veules. 1888. Réimpression. Bertout Luneray, 1980. p 79/114.
• 9
  Mensire R. Seigneurs et châteaux du noble pays de caux in Saint-Valéry en Caux et ses alentours. Ed Le Vieux Saint-Valery, 1980. Imp Bertout, Luneray. pp 189-239 ; p205/206.
• 10
  Philippe Legendre, pasteur de l’église réformée de Quevilly, auteur de « l’histoire de la persécution faite à l’église de Rouen sur la fin du dernier siècle (XVII) »,1874. Rouen. Deshays Editeur. Le préambule par E. Lesens rapporte la biographie des Legendre.
• 11
  ADSM, C. 1327, registre et ADSM, 179 J 753 : Vanier G.  Une famille de grands marchands rouennais au XVI et XVII ème siècle. Les Le Gendre. Société libre d’émulation du commerce et de l’industrie de la seine inférieure. Imprimerie Dieppoise. 1950.140p.
• 12
  ADSM, C. 1330 registre et Frondeville De, Henri et Odette. Les conseillers du parlement de Normandie de 1641 à 1715. Tome IV. Rouen Lestringant. 1970.
• 13
  Notice sur Thomas Legendre par M. Garreta pp 47-55 in Bulletin de la Commission des antiquités de la Seine- Maritime. Tome XI. 1ère livraison. Rouen 1913. voir page 50-51.
• 14
  ADSM, Rouen, p. St Jean 4E 2062, vue 15/190  et 3 E999, registre 252, vue 13/179.