Saint Lézin

Comme pour les autres saints « présents » dans l’église de Blosseville, cet article décrit sommairement la statue de Saint Lézin et présente quelques éléments de la biographie du saint et de sa légende.

Compte tenu de l’importance considérable de saint Lézin pour le village, dont il est le « patron », un autre article (saint Lézin à Blosseville) lui est consacré.

D’autres articles concernent les représentations de saint Lézin dans l’église : trois sur les verrières des baies 5, 7 et 9 ; un sur la deuxième statue du saint.

Cette statue de saint Lézin1 Voir le livre de Bernadette Chaignet-Sortais – L’église Saint Martin de Blosseville-sur-Mer – Editions Blosseville Histoire Vivante 2021., en bois, est installée, dans la chapelle Nord (chapelle de la Vierge) dans une niche ménagée au-dessus de la porte conduisant à la sacristie. A la construction de la sacristie au XIX ème siècle, cette niche a remplacé une baie.  La statue ne pouvait donc pas se trouver à cet endroit auparavant, mais nous ignorons où elle était installée. 

Saint Lézin – Statue placée dans une niche de la chapelle

Saint Lézin est représenté bénissant de la main droite, index levé ; il tient sa crosse d’évêque de la main gauche et porte une mitre ornée d’éléments dorés.

Son visage rond et peu expressif semble avoir été revêtu d’un collier de barbe, dont il reste quelques traces.

Saint Lézin – Visage

Sur le socle est inscrit de face « St Lessī prie poznoz» et sur le côté « 1577 ».

Saint Lézin – Inscriptions du socle de la statue
Saint Lézin – Inscriptions de face du socle

En 1577, le vicomte de Blosseville était Jean du Moucel. Il y avait déjà un siècle que saint Lézin était honoré à Blosseville, comme l’attestent les statuts d’une confrérie2Existant depuis le Moyen Age, les confréries étaient des associations de paroissiens dont l’objet principal consistait à venir en aide lors de maladies et de décès, en organisant des actions de bienfaisance, des prières et des offices ainsi que les obsèques.  Elles contribuaient également à l’ornementation de l’église paroissiale, notamment par le don de statues., déposés le 6 février 14773Abbé Louis MARTIN, Les anciennes confréries du diocèse de Rouen, Fécamp, L. Durand et fils, 1936. Il s’agit du dépouillement des registres de l’archevêché.. Il est cité en tête des saints patrons de cette confrérie, devant Antoine, Sébastien, Jean et Nicolas.

Enregistrement des statuts d’une confrérie à l’église St Martin de Blosseville. Extrait du Registre de l’Archevêché de 1477 (ADSM G9467).
Le nom de Lessin est entouré.

Qui était saint Lézin ?

Les informations données ci-dessous sont une « synthèse » de différentes sources4Les vies des saints personnages de l’Anjou par R.P. Dom François Chamard (1863). 5La monarchie sainte, historique, chronologique et généalogique de France, par R.P.  Dominique de Jésus (1670). souvent hagiographiques, qui diffèrent légèrement entre elles notamment sur les dates.

Saint Lézin est né vers 530-540. Son père, Garnier, était un homme riche et vertueux, apparenté à la famille du roi mérovingien Clotaire Ier (498-561), dont il fut un des proches conseillers. Il fit donner une très solide éducation à son fils Lézin, qui montra les meilleures dispositions pour les études. Lézin se montra également habile dans le domaine militaire et vaillant sur les champs de bataille. Il gagna ainsi l’estime du roi, qui avant de mourir, le nomma gouverneur des provinces armoricaines, installé à Angers. Il fut maintenu dans ses fonctions par le successeur de Clotaire, Chilpéric Ier (ca. 530-584). Gouverneur zélé, sage et impartial, Lézin était également un chrétien très fervent, porté sur le jeûne et la prière.

Il vivait donc avec la retenue d’un religieux mais, vers la fin des années 570, cédant à l’insistance de ses amis et de son suzerain, il consentit à se marier avec une princesse de son rang. Cependant, à la veille des noces, sa fiancée fut atteinte par la lèpre. Bouleversé par cet événement, Lézin quitta ses fonctions civiles, vendit tous ses biens, et se retira dans une abbaye (Chalonnes ou Nantilly, dans l’actuel Maine-et-Loire) où il mena une vie de méditation, de pénitence et de piété.

Aux environs de 590, l’évêque d’Angers, Audouin, vint à mourir. Les habitants d’Angers se souvinrent de leur ancien gouverneur qu’ils appréciaient ; les autorités ecclésiastiques et royales proposèrent la charge d’évêque à Lézin. Avec regret pour sa vie monacale, et surpassant son humilité, ce dernier accepta.

Lézin fut un évêque juste et bon, voué à sauver les âmes mais aussi les corps, soulageant les misères des pauvres et des prisonniers. Il avait gagné le cœur des gens, grâce à sa vie personnelle exemplaire, à sa grande éloquence et…à l’aide de Dieu par quelques miracles. Ainsi ont été rapportés par les chroniqueurs et disciples de saint Lézin, de nombreux cas de guérisons d’aveugles, lépreux, boiteux et autres infirmes (cf., Article sur Verrières de St Lézin).

Il fit construire à Angers un monastère pour accueillir des disciples et des pèlerins, avec l’idée de s’y retirer lui-même. Mais les autorités royales et ecclésiastiques ne l’entendaient pas ainsi et il dut accomplir sa mission épiscopale jusqu’à son dernier souffle, malgré les infirmités dont il souffrait.

Il mourut un 1er novembre vers 605 et a été enterré, dans la chapelle de ce monastère, Saint Jean Baptiste.

Il a été canonisé en 656. Il est vénéré le 13 février, qui serait le jour de cette canonisation. (on trouve aussi, dans certaines sources, qu’il s’agirait du jour du transfert de ses reliques ou du jour de sa consécration en tant qu’évêque).

Le culte de saint Lézin à Blosseville

Nous ne savons pas véritablement ce qui a motivé le choix de saint Lézin par une confrérie blossevillaise en 1477. Est-ce la poursuite d’un culte de ce saint, déjà ancré à Blosseville ? Est-ce « l’importation » à cette date d’un saint vénéré alors en Anjou (voir infra) ?

En l’état actuel des recherches, nous penchons pour cette deuxième hypothèse.

En effet, hors d’Anjou, saint Lézin est présent uniquement à Blosseville6A l’exception d’un vitrail à l’église de la Chapelle-Janson en Ille-et-Vilaine. et en tout cas pas dans d’autres églises normandes, si l’on excepte la petite chapelle de Pleine-Sevette (voir ci-dessous). Ceci plaide pour qu’il existe une raison particulière liée à la paroisse ou à la Vicomté, qui a conduit à accueillir ce saint. Si cette circonstance a pris place à l’époque de la création de la confrérie susmentionnée dans la deuxième moitié du XV ème siècle, le Vicomte était alors Jean Ier de Saint-Maards. Or ce dernier a eu des liens avec la cour d’Anjou et notamment avec Pierre de Brézé, seigneur angevin qui devint normand. Il pourrait donc être celui qui a introduit saint Lézin à Blosseville7Voir une description du contexte de l’époque et un argumentaire détaillé sur ce sujet dans l’ouvrage de Bernadette Chaignet-Sortais aux pages 14 à 18..

En tout cas, le « succès » de saint Lézin ne s’est pas démenti, puisqu’une deuxième confrérie créée en 1607, « la confrérie des Cinq Plaies », l’a repris parmi ses patrons. Par la suite, saint Lézin est placé quasiment au même rang que saint Martin, officiel patron de l’église. C’est ainsi qu’en 1747, ont été placées dans le chœur leurs deux statues en pied. Dans l’appellation courante des blossevillais, l’église est Saint-Lézin. Les registres paroissiaux puis d’état-civil font état d’un nombre significatif de Lézin.  Même si elle n’a plus le lustre d’antan, la fête du village se tient toujours à la saint Lézin, le 13 février. (cf., Article « Saint Lézin à Blosseville »)

La chapelle de Pleine-Sevette

A quelques kilomètres de Blosseville, sur la commune de Néville, au hameau de Pleine-Sevette, la chapelle Saint Jean-Baptiste renferme un beau retable en bois du tout début du XVII ème siècle. Ce retable, que le « curé de Drosay et chapelain de la chapelle a fait faire », est orné d’une vingtaine de saints et saintes, essentiellement peints en trompe-l’œil. Parmi eux, se trouve, en médaillon, un buste de st Lézin avec sa crosse et sa mitre d’évêque. La présence de st Lézin sur ce retable n’est probablement pas le signe d’un culte particulier à Pleine-Sevette ; l’artiste ou le commanditaire du retable a sans doute voulu mentionner un personnage honoré dans le voisinage, à Blosseville, depuis plus d’un siècle.

Médaillon de st Lézin peint sur le retable de la chapelle Saint Jean-Baptiste à Pleine-Sevette (Seine-Maritime)

Saint Lézin en Anjou8Voir notamment Bulletin de l’Association de Sauvegarde des Chapelles et des Calvaires de l’Anjou – n°53 –  juin 2020.

Evêque d’Angers, saint Lézin est resté populaire dans cette région, connue entre autres pour son activité dans l’extraction et la taille d’ardoises. Saint Lézin a donc été naturellement le saint patron des ardoisiers, pour lesquels il aurait fait des miracles.

Image des ardoisières d’Angers Miracle de st Lézin arrêtant d’un signe de croix, la chute d’un bloc de roche, dans une carrière d’ardoises.

Un village porte le nom de Saint Lézin (fait aujourd’hui partie de la commune regroupée de Chemillé-en-Anjou). A Trélazé, une cité ouvrière portait ce nom ; aujourd’hui il reste une place et une chapelle. A Rochefort-sur-Loire, l’oratoire de la Fontaine Saint-Lézin, attesté depuis 1489, est aujourd’hui un édifice du XIX ème siècle abritant une statue du saint. 

Pour rappeler le protecteur des ardoisiers, le traditionnel accrochage d’outils dans l’église de Blosseville a placé, à l’été 2022, quelques outils de couvreur à côté de cette statue du saint.

Église Saint-Martin de Blosseville – Accrochage 2022 Outils de couvreur aux côtés de la statue de saint Lézin

Références

  • 1
    Voir le livre de Bernadette Chaignet-Sortais – L’église Saint Martin de Blosseville-sur-Mer – Editions Blosseville Histoire Vivante 2021.
  • 2
    Existant depuis le Moyen Age, les confréries étaient des associations de paroissiens dont l’objet principal consistait à venir en aide lors de maladies et de décès, en organisant des actions de bienfaisance, des prières et des offices ainsi que les obsèques.  Elles contribuaient également à l’ornementation de l’église paroissiale, notamment par le don de statues.
  • 3
    Abbé Louis MARTIN, Les anciennes confréries du diocèse de Rouen, Fécamp, L. Durand et fils, 1936. Il s’agit du dépouillement des registres de l’archevêché.
  • 4
    Les vies des saints personnages de l’Anjou par R.P. Dom François Chamard (1863).
  • 5
    La monarchie sainte, historique, chronologique et généalogique de France, par R.P.  Dominique de Jésus (1670).
  • 6
    A l’exception d’un vitrail à l’église de la Chapelle-Janson en Ille-et-Vilaine.
  • 7
    Voir une description du contexte de l’époque et un argumentaire détaillé sur ce sujet dans l’ouvrage de Bernadette Chaignet-Sortais aux pages 14 à 18.
  • 8
    Voir notamment Bulletin de l’Association de Sauvegarde des Chapelles et des Calvaires de l’Anjou – n°53 –  juin 2020.

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